L’accès au logement autonome est particulièrement complexe pour les personnes en situation de handicap. Une étude de la DREES [1] montre que parmi les jeunes de 25 ans sortant d’établissements dédiés aux personnes en situation de handicap, seul·e·s 5% accèdent à un logement personnel.
Depuis 2008, l’ALJT et l’association LADAPT ont développé un partenariat qui vise à faire entrer en résidence-FJT des jeunes en situation de handicap, via le SAVS (Service d’Accompagnement à la Vie Sociale) de LADAPT. Les jeunes suivi·e·s par ce dispositif sont donc accompagné·e·s à la fois par la résidence et par le SAVS.
L’équipe du SAVS est composée de six personnes, dont un psychologue et trois éducateur·ice·s spécialisé·e·s. Leur objectif est d’accompagner les jeunes qui le souhaitent vers le logement et l’autonomie. La création de ce service est intimement liée au partenariat avec l’ALJT, association gestionnaire de résidences, puisque le cœur de l’activité du SAVS est de proposer une solution de logement et d’accompagnement en résidence aux jeunes en situation de handicap. À Paris, parmi la vingtaine de résidences, une dizaine sont concernées par ce dispositif. Au sein de chaque résidence des travailleur·se·s sociaux·ales accompagnent les jeunes dans leurs démarches et proposent des animations collectives.
Le processus d’admission des jeunes par le dispositif
Les jeunes qui candidatent auprès du SAVS sont souvent orienté·e·s par la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées). Leurs situations peuvent être très variées : hébergé·e·s chez leurs parents, sortant·e·s d’ASE, et plus rarement en situation d’urgence. Ce SAVS accueille des personnes avec tous types de handicaps, mais les handicaps invisibles -notamment psychique et cognitif, sont majoritaires.
Le SAVS examine les candidatures afin de s’assurer que le projet et le profil du·de la jeune correspond aux compétences du SAVS : « d’autres services peuvent être plus adaptés, par exemple les SAMSAH (Service d’Accompagnement Médico-Social pour Adultes Handicapés), c’est plus médicalisé, ça peut être plus adapté pour des jeunes qui ont des troubles somatiques importants » (Nelly Nunes, cheffe de service du SAVS). Si l’accompagnement du SAVS parait pertinent pour aider le·la jeune à réaliser son projet, alors la candidature est acceptée.
Selon les besoins, le SAVS peut assurer un accompagnement en amont de l’installation en résidence. La candidature du·de la jeune est ensuite présentée lors des réunions organisées entre les professionnel·le·s du SAVS et de l’ALJT, qui vont ainsi chercher une place dans une des résidences.
L’entrée et la vie en résidence des jeunes accompagné·e·s
Lorsque le·la jeune entre dans son logement, il·elle est accompagné·e par les équipes du SAVS et de la résidence.
Les équipes du SAVS et des résidences sont en lien régulier. Elles vont s’informer mutuellement d’un changement de situation d’un·e jeune, d’une animation collective qui va avoir lieu en résidence, etc. : « on prévient les collègues du SAVS quand on a une visite technique, quand on a un programme d’animation on l’envoie, pour qu’ils puissent en parler aux jeunes. On va aussi les tenir informé·e·s, selon comment on les sent dans les résidences. Donc on a des liens par téléphone, mail, mais aussi entre deux portes ou en face à face parce que les équipes du SAVS viennent souvent en résidence. » (Une référente ALJT)
Les réunions mensuelles entre les équipes des deux structures sont également l’occasion de partager des informations concernant les situations des jeunes accompagné·e·s si certaines méritent une attention ou une coordination renforcée. Ce partenariat se vit donc au quotidien et implique une forte coopération des intervenant·e·s des deux associations « On travaille tout le temps ensemble, on est un peu obligé dans l’intérêt du jeune » (Une éducatrice SAVS).
Quelles plus-values du partenariat pour les jeunes et les équipes ?
Le travail conjoint entre le SAVS et l’ALJT permet d’abord l’inclusion de jeunes en situation de handicap : « Ca permet de réussir à faire en sorte que des personnes en situation de handicap soient traitées de la même manière que les autres, qu’elles ne soient pas pointées du doigt, qu’elles puissent se sentir comme les autres. (…) Pour certains il y a une vraie appropriation du collectif et la plus-value du collectif qui marche vraiment bien. On a plusieurs jeunes du SAVS qui sont même au CVS [2] ! » (Une référente ALJT).
Cela permet également d’éviter des ruptures dans le parcours des jeunes :
A la marge, le partenariat peut également fonctionner dans l’autre sens : les équipes de l’ALJT peuvent orienter des jeunes ayant une reconnaissance de la MDPH vers le SAVS, si le·la jeune est d’accord et en exprime le besoin, mais cela ne représente qu’une à cinq personnes par an.
Enfin, les échanges entre les équipes du SAVS et de l’ALJT sont très enrichissants et gratifiants pour les équipes. En plus des réunions mensuelles qui sont l’occasion d’échanges de pratiques, les équipes se réunissent chaque année pour une journée sur une thématique spécifique : « à la dernière réunion le SAVS a présenté comment se fait un dossier MDPH. Ce qu’il faut faire ou ne pas faire, sans rentrer dans de la formation parce que les équipes du FJT sont rarement amenées à faire ces démarches, mais plutôt de la sensibilisation sur des thématiques. » (Une référente ALJT)
En 2024, une vingtaine de jeunes étaient logé·e·s en résidence grâce à ce partenariat, un chiffre qui varie selon les années, mais qui reste en deçà de l’objectif fixé par la convention de partenariat qui était de quarante jeunes accompagné·e·s chaque année par le SAVS. Le frein majeur identifié est le manque de logements disponible, à la fois au sein des résidence-FJT, mais également pour permettre la sortie ensuite vers le logement autonome. Néanmoins, le bilan de ce partenariat, tant du point de vue de l’ALJT que du SAVS, est très positif. Il vise donc à perdurer et à se renforcer encore davantage au fil des années. L’ALJT envisage même de répliquer ce partenariat dans d’autres départements.
[1] DREES (Direction de la Recherche, des Etudes de l’Evaluation et de la Statistique), le handicap en chiffres, 2024, p.32
[2] Conseil de Vie Sociale, lieu d’expression et d’échanges entre les résident·e·s. Les membres du CVS portent la voix de l’ensemble des jeunes de la résidence pour améliorer la vie quotidienne dans la structure.
[3] Données issues de l’enquête Nationale Logement de l’INSEE en 2013
[4] DREES, le handicap en chiffres, 2024
[5] Etude de Pierre-Yves Baudot et Thomas Chevallier, Les handicaps de l’enquête logement. Etude de l’expérience résidentielle des personnes en situation de handicap à partir de l’ENL 2013